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Avec Cahier de nuit Jean-Michel Maulpoix propose un nouveau volume de poèmes en vers faisant suite à Rue des fleurs qui lui avait valu en 2022 le Prix Goncourt de la poésie.
C'est en renouant avec des formes versifiées parfois plus classiques que l'auteur creuse l'obscurité de ce que Michaux appelait "l'espace du dedans" qui est d'abord le mystérieux territoire de notre solitude : la chambre d'écho des souvenirs et des regrets, les coulisses des rêves traversés par les ombres des disparus, le cri des trains d'autrefois filant dans la nuit, ou le pas feutré du dormeur sur les chemins d'herbes de son enfance semés de petits cailloux blancs.
C'est toujours dans une langue simple que Jean-Michel Maulpoix part à la recherche de la lumière au fond de la nuit... -
"Les poèmes sont des fleurs, dit-on parfois. Ne parle-t-on de florilège ? Ce mot fait sourire. Il y va d'autre chose que d'un art des bouquets. Chaque poème est une éclosion de sens. La poésie fait éclore dans la langue la douleur, l'amour, l'angoisse, la beauté..., elle les fait apparaître, leur prête voix, les révèle... Et plus le poème reste proche de la sensation, de l'impression, puis de l'éclosion qui lui ont donné naissance, plus il affirme sa nécessité propre. Écrire un poème, peut-être n'est-ce en définitive que cela, donner à assister au moment de la naissance, à l'éclosion même du sens, syllabe après syllabe. N'est-ce pas tout le contraire du discours qui livre le sens tout prêt ? Un poème est un organisme vivant. Il pousse sur le papier. Il anime le langage et ranime la curiosité. Il sort les mots de leur torpeur, il les réveille, il les fête.
C'est cela, la rue des fleurs."
Jean-Michel Maulpoix
Pause lyrique entre deux livres de prose, avec ce recueil de poèmes Jean-Michel Maulpoix renoue avec la poésie pure et le plaisir sensuel des mots.
Prix Goncourt de la Poésie 2022 -
À présent qu'ils ont franchi le seuil, j'imagine ce vieil homme et cette vieille femme se retrouvant au fond du grand Jardin, délivrés de leur longue fatigue, oublieux de la laideur de leur nudité, gourmands de pêches, de poires et de melons, près de l'arbre à désir, à savoir et à poèmes. Mon père et ma mère veillant sur les fruits profonds de la nuit, avec des rires et des baisers, de toute leur enfance restée vive, ébouriffant la cendre, leur amour à tout jamais ayant le dernier mot.
Dans cette Hirondelle rouge, dont le titre fait écho aux toiles oniriques de Joan Miró (L'Hirondelle éblouie par l'éclat de la prunelle rouge), Jean-Michel Maulpoix évoque avec beaucoup de pudeur ses parents disparus. En des tableaux très courts, il dresse d'eux des portraits fragmentaires et intimes. Comment continuer à vivre et à écrire, telles sont les questions que pose le fils et que tente de résoudre le poète.
"Qu -
"Je me tenais naguère devant la page blanche comme en face de la mer, songeur, fixant le bleu et rêvant de partances. À présent, je m'embarque. Cette vie est une succession de guichets, de barrières à franchir et de zones de transit. "Cahier du jour", "Journal privé", "Carnet d'envols", on lira ici les allées et venues d'un homme dans la prose de son temps. Poussant jusqu'au poème l'influx et les brisures de la prose, assailli de rouge et de noir plutôt que distillant l'azur, comédien de sa propre soif, parvenant mal à distinguer entre l'intime et l'anonyme.
Essais de voix, récitatifs ou chants brisés, ces pages tracent en définitive un portrait du poète fin-de-siècle, passant, passeur et passager : il fait tomber l'amour dans le domaine public, mais toujours rêve d'un visage où se pencher comme sur une eau claire, non pour y refléter mais pour y boire."
Jean-Michel Maulpoix. -
"Quelqu'un marcherait sur la neige, sous un ciel jaune et gris d'hiver. À pas lents, un peu lourds, qui se rapprochent ou qui s'éloignent. Juste une silhouette, enveloppée dans un manteau de laine noire. Un rudiment de signe sombre cerné par la blancheur. Allant, sans que l'on sache pourquoi, ni vers où. Devant lui, nul chemin visible. Seulement l'hiver qui tombe, recouvrant sans un bruit l'empreinte de ses pas sur la neige.
Quelqu'un marche dans le silence. Quelqu'un s'efface dans l'invisible. Sans paroles, sans parfum. Personne à son côté. Parfois levant la tête. Parfois baissant les yeux. Mais c'est en lui que tombe la neige où il continue de marcher.
Neige : le nom d'autre chose où chaque pas s'enfonce de son poids d'énigme."
Jean-Michel Maulpoix