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Pour clore son nouveau recueil de contes, Marcel Schneider, éternel admirateur d'Hoffman et de Jean-Paul Richter, explique ainsi sa prédilection pour ce genre : « A une époque de réalisme exaspéré, de naturalisme à outrance, il semble que le conte, et surtout le conte de fées n'intéresse plus personne. Voilà une excellente raison pour en composer. Quand on a toujours été à contre-courant, il convient de faire ce que personne ne fait. Le conte merveilleux me sert d'antidote contre le désenchantement cruel de notre époque. » Tour à tour tragiques, émouvants, réjouissants ou fantaisistes, ses contes nous font voyager en féerie, au royaume d'enfance. Les souverains régnant sur d'étranges palais, les sorcières, les magiciens, la faune des créatures des forêts qui peuplaient les contes du XVIIè siècle, Marcel Schneider les ressuscite. Dans une langue riche et poétique, il recrée l'univers du merveilleux et revisite les mythes séculaires à l'aune de notre modernité.
La quête d'Un Lambeau de nuit est un écho de celle de Peau d'âne ; Le Roi Ourson et ses rougeoyants apparaît comme une variation autour de l'Histoire de Blondine de la comtesse de Ségur... Mais à travers des histoires souvent dépourvues de morale, l'auteur nous invite également à interroger l'histoire récente et la force persistante du mythe. Les Jours de féerie qu'il égrène s'ouvrent sur l'ici et l'ailleurs. -
On a beau se défendre contre l'horreur du monde, elle finit toujours par vous gagner. Mais les écrivains, surtout quand ils ont le goût du fantastique, savent lui résister mieux que d'autres : la poésie doit sécréter d'offensifs anticorps. Avec Marcel Schneider, la guerre et ses calamités rentrent dans le rang de l'imaginaire, la Forêt Noire reste la terre d'élection du romantisme, malgré les S.S. qui rôdent ; les Vosges gardent leur mystère en plein conflit, l'Alsace sa sensibilité singulière, la Prusse son aura païenne, et même la Turquie lointaine, la Cappadoce, ou l'Angleterre, échappent aux blessures de l'histoire, quand un romancier les contemple à "la lumière du Nord", celle du rêve, des miracles, des rencontres et des aurores boréales. De Fribourg au château d'Oubli, en pays cathare, de Koenigsberg à Constantinople, avec un petit détour par le Marais de Nicolas Flamel et les Halles de Ravaillac, c'est un Marcel Schneider insolite qui promène ici sa curiosité, un instant retenue par les ravages du réel. Mais on ne tarde pas à le retrouver tel qu'en lui-même son talent nous l'a rendu familier, conteur aérien de songes et de visions, où sans doute se cachent les seules réalités qui valent encore en ce monde un peu d'attention.
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Au dix-huitième siècle, le Carnaval à Venise durait six mois par an et la Piazza était le premier salon d'Europe : courtisanes, tripots, excès, folies. Patriciens et menu peuple concouraient à faire de Venise un théâtre permanent. Avant la chute, quelle magnificence ! Vivaldi, Marcello, Gozzi, Casanova, les Tiepolo, Goethe, et tous les voyageurs prestigieux. Mais arriva l'année 1797 et Bonaparte mit fin à la féerie. Désormais, les morts de Venise prennent la relève et montent la garde sur la splendeur du passé. Le Carnaval est fini, commencent la nostalgie et le souvenir.
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Histoires à mourir debout est un recueil de quelques dix nouvelles dont les trois sujets sont la guerre, le mal et la folie. Des nouvelles noires. Dans la France du XVIIIe siècle, et surtout en Alsace, mais aussi en Languedoc, en Provence, en Europe centrale, voici des hommes qui sont la cruauté même et mènent des vies que fondent le crime et l'horreur. Ce sont des nouvelles de cape et d'épée, pleines de chevauchées terribles et d'actes sanguinaires : sombres tableaux que viennent heureusement adoucir, par le biais de l'humour et de la féerie, des jeunes filles. Elles ont toutes de treize à quinze ans, elles sont toutes merveilleuses et renvoient à un autre monde que celui des spadassins, des fanatiques et des sacrilèges qui traversent le livre en lettres de feu et de sang.
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Si l'on se souvient qu'on appelle " vanités " les peintures qui représentent symboliquement, par des emblèmes ou des allégories, la fuite du temps et la brièveté sans recours de la vie, on comprend aussitôt le sens du titre et le propos du livre de Marcel Schneider, tel qu'il nous l'explique lui-même : " Je vis entre deux vanités, suspendues aux murs de ma chambre, de l'un et l'autre côté de mon lit ; elles figurent mon ermitage dans le désert. L'une, dans le go-t espagnol, suggère le parfait désenchantement ; sur le mur opposé, l'autre, d'une inspiration mondaine, et qui provient du nord de la France, énumère les plaisirs des sens. Je passe d'une vanité à l'autre, et c'est passer d'un monastère castillan dans un salon parisien : deux ordres de pensée, deux styles de vie, deux façons d'aimer. Mais c'est en moi que je me promène, dans des régions de mon esprit où tour à tour, et quelques fois en même temps, m'attirent des aimants auxquels je ne cherche pas à résister. Je vais ici et là, selon l'heure et l'occasion, et quel mal de céder à ses penchants qui ne se contredisent que pour un esprit borné ? "
Du côté de l'Estramadure, avec Zurbaran, le Greco, sainte Thérèse d'Avila, Charles-Quint, Don Juan, ou du côté de chez Proust, après Nerval et Delacroix, l'auteur traque une certaine idée de l'éternité qui le hante, où se mêlent symboles et fantasmes. Partout et toujours, les mystiques aussi bien que les poètes ou les peintres tirent leur gloire du mépris d'autrui. Ils apportent d'ailleurs leurs certitudes et leur génie.
Avec cette provocante limpidité qui lui est coutumière, Marcel Schneider nous introduit dans son univers, où la morale commune et les préjugés à la mode n'ont pas plus cours que la vanité.
En forme de méditation, coupé de nouvelles et de brèves études, cet ouvrage profond et surprenant est un voyage au-delà des apparences, dans le merveilleux quotidien d'un esprit rare, qui sait être grave sans jamais peser. -
Au temps des guerres de Napoléon, un officier autrichien, perdu dans les Alpes de Carniole. Seul et blessé, parmi les montagnes où il vient d'enterrer son ordonnance, Franz-Sylvius von Willersdorf ne peut plus attendre qu'une mort prochaine ; les Français ont exterminé ses compagnons d'armes, et les partisans slovènes, cachés dans les forêts, passent pour impitoyables et sanguinaires...
On dirait le début d'un conte romantique, mais c'est un tour surréaliste que prend l'aventure du jeune homme. Quand il se réveille, dans une caverne, il se demande pourquoi les hors-la-loi l'ont épargné et quel est l'avenir qu'ils lui réservent. Dans son délire, le lieutenant assiste à des scènes singulières, presque barbares ; est-ce une vision née de sa fièvre, une réalité ?
Il vivra désormais dans un monde à part. Il ne s'étonnera pas d'être enfermé dans un château, à la merci d'une princesse patriote et passionnée, dont il reste " la prise de guerre ". Qui est cette Bogomila ? Quelle raison a-t-elle de lui sauver la vie ? Un simple caprice ? Mais peut-elle être à la fois sa maîtresse et son ennemie ?
Quel est le sens des noces wagnériennes auxquelles on le conviera plus tard ? Serait-ce une initiation ? Et comment se retrouvera-t-il, après un an de captivité, devant un conseil de guerre qui l'accuse d'espionnage et de trahison ?...
Il ne faudra pas moins d'un secours surnaturel pour tirer Willersdorf de ce mauvais pas et lui permettre de revoir une dernière fois, en Slovénie, une Bogomila toujours aussi mystérieuse, malgré la défaite de sa cause et l'écroulement de ses illusions.
Comme souvent chez Marcel Schneider, la poésie nous emporte. Une sorte de logique onirique rend nécessaires les péripéties les plus inattendues, parce que la puissance d'évocation d'un maître du fantastique suffit à leur donner la vérité de l'évidence.
Tout intérieure, cette évidence, mais Marcel Schneider compte parmi ces rares auteurs qui savent nous faire pénétrer dans leur rêve, au point que ses songes nous habitent, et bientôt nous appartiennent. -
Pour un écrivain fantastique, le rêve et la réalité sont étroitement apparentés l'un à l'autre. L'invisible demeure toujours à fleur de vie, si proche, si tentant. L'état de grâce suffit pour s'y retrouver ; il s'agit ensuite de déchiffrer l'énigme, et de traquer la révélation profonde qu'elle réserve à ceux qui savent ne point se perdre au coeur du labyrinthe.
Marcel Schneider est le guide " rêvé " dans ces forêts obscures du songe. Sa référence littéraire à La Sibylle de Cumes intriguera peut-être. Mais n'est-ce pas la Sibylle qui enseigna le chemin des Enfers à Enée, ainsi que le moyen d'en revenir ? L'auteur des Colonnes du Temple et de La Branche de Merlin nous invite ici à le suivre dans un voyage un peu semblable.
Son livre est le récit d'un rêve, suivi d'une tentative d'interprétation, ou plutôt d'élucidation progressive, menée avec une rigueur digne des analyses de Jung. Marcel Schneider, cependant, ne joue pas au philosophe ; doué de ce style d'une clarté irréprochable qu'on lui connaît, il reste un écrivain, d'abord. Sa recherche de la vérité demeure passionnante de bout en bout : c'est une manière de roman policier où Jérôme Bosch mènerait l'enquête, assisté de Gérard de Nerval.
Transporté " au-delà de ce monde ", le lecteur ne s'y sent pas dépaysé ; il y reconnaît les grands mythes et les démons dont nous sommes tous habités. " Chercherait-on quelqu'un d'autre, on ne trouverait que soi ", déclare le narrateur. Cela vaut aussi pour chacun de nous. Ce bref ouvrage, mais d'une singulière plénitude, nous propose - mieux, nous impose - de nouvelles pistes pour explorer nos petits enfers personnels, que nous essayons trop souvent d'ignorer avec tant de soins inconscients... -
L'éternité fragile Tome 5 ; les gardiens du secret
Marcel Schneider
- Grasset
- Littérature Française
- 7 Février 2001
- 9782246614593
"Ma vie est un songe qui passe à travers moi": ainsi s'exprime Marcel Schneider, qui aura toujours préféré la liberté intérieure, celle du rêve, aux contraintes avilissantes de la vie réelle. Le spécialiste du fantastique, le germaniste familier des mythes de la Forêt noire, le visiteur des salons parisiens, est tôt parti à la quête du beau. Il y a du rebelle chez cet esthète. C'est le sens de ce nouveau volume ajouté à son entreprise de mémoire, L'éternité fragile. On passe ici du monde, celui de la première guerre mondiale, celui des amitiés "admirables", de Georges Dumézil à André Pieyre de Mandiargues, sans oublier Jean Cocteau, au Tramonde, concept qui tient de l'émerveillement devant la singularité poétique de l'existence. Le germaniste cite volontiers Goethe : "L'ère du beau est révolue". Ce pessimiste qui ne moralise pas commente le snobisme de Proust, l'imaginaire de Gabriele d'Annunzio, ou les leçons d'insolence d'un après-guerre qui n'était pas du côté de Jean-Paul Sartre. Pour finir, il consacre à la danse des pages virevoltantes où l'on voit pirouetter Nijinski, Joséphine Baker, Noureev, Roland Petit. La danse, métaphore d'une beauté qui toujours s'échappe.
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Il faut laisser maisons et jardins
Marcel Schneider
- Grasset
- Littérature Française
- 11 Février 2009
- 9782246752295
A lire la dernière strophe du poème de Ronsard, dont Marcel Schneider s'est ici inspiré, « Adieu chers compagnons, adieu mes chers amis, je m'en vais le premier vous préparer la place », on devine avec mélancolie que ce livre est aussi un Adieu. Un testament. Nulle amertume chez cet humaniste misanthrope, cet érudit indifférent à son temps, pour qui 1936 ne signifie pas l'invention des congés payés mais l'obtention avec brio de son agrégation de latin-grec ! Qui, à l'heure du politiquement correct, reprend à son compte la définition de la démocratie par Baudelaire : « La démocratie est le plus énergique dissolvant de toute vertu que le monde ait connu jusqu'ici ». Dans le lignée de L'Eternité fragile, cette fragile architecture du temps recomposé qui sont ses mémoires, Marcel Schneider se souvient, et les figures amies ou admirées sont évoquées ici avec précision : Lise Deharme et André Breton, un Julien Gracq muet qui aime les mondanités, un Lord Byron musical, Nijinski érotico-mystique, Denise Bourdet en Panthéon des gloires défuntes, ainsi qu'un long essai sur Proust et le faubourg Saint-Germain.
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Vous qui habitez sur une étoile , dit un jour François Mauriac à Marcel Schneider, signifiant par là qu'il menait une existence à part, sans se mêler de rien. Il est bien vrai que celui-ci a toujours vécu dans un monde parallèle, témoin peu attentif à ce qui se passe dans la réalité.
Sur une étoile raconte une histoire d'amour singulière : amour pour un pays, l'Alsace, considéré comme un royaume de féerie dont l'auteur est un prince dépossédé et pourtant comblé. Par choix comme par atavisme, Marcel Schneider a cherché un refuge imaginaire dans l'Alsace de ses souvenirs d'enfance, l'Alsace des forêts et des légendes dont il décrit l'histoire à sa façon. Au lecteur de juger si cette Alsace-là est pure chimère ou si elle détient une vérité profonde, ce qui pour nous équivaut à l'éternel. -
Le Prieuré est une maison hantée. Elle porte malheur. La malédiction vient des atrocités qui se sont déroulées là en 1794, quand la Convention faisait rôtir la Vendée. Elle frappe les propriétaires du lieu, ou leurs enfants.
La dernière victime, et la plus inattendue, est Edouard, jeune Parisien venu passer l'été pour servir de précepteur au neveu du maître de céans, le comte de Saint-Aignan, infirme disgracié qui expie on ne sait quelle faute... Sa monstruosité le dénature et il exerce sur tous un pouvoir étrange et pervers. Edouard, imaginatif et rêveur, subit une double tentation, celle de l'amour et de la mort. Ceux qui habitent le Prieuré l'aident à surmonter cette épreuve et le salut lui viendra de celui qui ose en détruire la partie maudite. Sur le lac désormais purifié, Edouard n'aura passé qu'un seul été.