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Grasset
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L'homme qui voulait être prince ; les vies imaginaires de Michal Waszynski
Samuel Blumenfeld
- Grasset
- essai français
- 29 Mars 2006
- 9782246652090
La biographie de Michal Waszynski pourrait se réduire à ces quelques lignes : Né en 1904, mort en 1965, il a été l'assistant de Murnau, a réalisé en 1937 le chef-d'oeuvre du cinéma yiddish Le Dibbouk, a travaillé comme cinéaste en Pologne de 1929 à 1939, puis comme directeur artistique en Italie et vice-président des productions Bronston en Espagne. C'est peu et c'est faux. La biographie de l'illusoire et somptueux Waszynski, telle que Samuel Blumenfeld nous la raconte à l'appui d'une documentation inédite, est une reconstruction totale.
Comment un juif né en Volhynie, c'est-à-dire nulle part, a-t-il pu se faire passer pour un prince catholique et un aristocrate polonais ? Comment a-t-il échappé aux camps pour survivre comme caméraman dans l'armée du général Anders ? Est-ce l'amour qui commande au mariage entre cet homosexuel raffiné et une comtesse romaine octogénaire qui lui lègue son immense fortune ? A-t-il vraiment lancé Audrey Hepburn, secondé Orson Welles sur le tournage d'Othello, assisté Joseph Mankiewicz dans la production de La comtesse aux pieds nus ? Mieux ! Dans l'Espagne franquiste de l'après-guerre, ce prince d'opérette qui possède une Rolls aux poignées de porte en or massif, va créer le plus grand studio d'Europe. Détournant des sommes considérables, esclavagisant des scénaristes black-listés à Hollywood, utilisant la propagande chrétienne comme déguisement de ses folies, il produit entre autres Le Cid avec Charlton Heston, reconstruit la cité interdite pour Les 55 jours de Pékin, aligne 350 statues sur le décor de La chute de l'Empire romain...
Comme disait le scénariste Philip Yordan : « Ils n'avaient pas compris que c'était un Prince de mes deux ».
Le Prince imaginaire, c'est le dernier Nabab et Zélig en même temps. -
Qui n'aurait voulu être Steve McQueen ? Qui n'aurait voulu avoir l'allure de celui qu'on surnommait The King of Cool ? Souvenez-vous du panoramique de L'Affaire Thomas Crown, où l'acteur embrasse longuement Faye Dunaway, et qui semble durer des heures. Souvenez-vous de la musique de Michel Legrand (The Windmills of your Mind), de la course sur la plage, mais aussi des yeux bleus de Josh Randall dans Au Nom de la Loi (1958-1961), le feuilleton qui rendit Steve McQueen célèbre, et auquel le roman de Samuel Blumenfeld emprunte son titre, en plusieurs sens. Fils unique et enragé, n'ayant jamais connu son père, champion automobile pilotant Jaguar ou Porsche, aimant la vitesse et le risque, les femmes et l'alcool, l'art martial et les drogues, The king of Cool s'affranchissait volontiers de la Loi, fût-elle celle d'Hollywood. Le voici réincarné.
En novembre 1980, le fils d'Isaac et Hannah Bergelson, un jeune juif à lunettes vivant sans aventures dans un foyer de la banlieue parisienne, écoute Roger Gicquel annoncer la mort de l'acteur à Ciudad Juarez des suites d'un cancer. Le monde s'écroule. Commence dans ce roman d'une nostalgie acidulée et d'une drôlerie égale à celle des premiers Philip Roth, la reconstitution d'une famille recomposée : celle des Bergelson, entre ratages et destin rêvé, et celle de Steve McQueen. « Il était devenu des nôtres. Il nous avait rejoint dans notre étrange exercice de surplace, pour vivre, dans le respect de notre tradition, au nom de la Loi ».