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Lettre Volee
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Jérôme Bosch : ou la fourmilière éventrée
Pierre Sterckx
- Lettre Volee
- 22 Septembre 2015
- 9782873174484
La peinture de Jérôme Bosch fascine tous les publics. Née autour de 1500, à la confluence d'un Moyen Âge moribond et d'une Renaissance exubérante, elle n'a pas épuisé aujourd'hui la puissance de son imagerie fantastique. L'homme ainsi que son oeuvre n'ont cessé de décourager les commentaires, analyses et décryptages abondants qui se sont succédé à leur sujet au cours de quatre siècles. On a parlé de secte, de psychose, d'alchimie, de perversion, de morale déguisée, sans pour autant suggérer une lecture éclairante de la personne et de l'art du solitaire de Hertogenbosch... Le présent essai ne prétend pas apporter une vérité péremptoire à ce sujet, mais il en propose cependant une approche nouvelle. Le « cas » Bosch y est cartographié selon son immersion dans le chaos et aussi par le biais de son rapport à une certaine conception de la schizophrénie. Comment ce peintre a-t-il réussi à orchestrer une logique, des structures, une harmonie au sein d'un univers intensément chaotique ? En d'autres termes : quelle est la cosmogonie-cosmologie de cette « fourmilière éventrée » ?
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Les Ambassadeurs de Holbein, avec sa fameuse anamorphose, constitue, pour l'auteur, un coup de théâtre génial dans l'histoire de la perspective, engagée depuis le Quattrocento, et qui suggère que la bonne vision est une question scénique impliquant la place et le rôle du spectateur à distance. Pour la première fois, et un siècle avant Les Ménines de Vélasquez, un tableau affiche son espace propre face à celui du spectateur et propose activement un vide essentiel désignant le destinataire de la représentation : le roi ou, de manière plus fulgurante encore dans sa modernité, le spectateur-roi.
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Jean Siméon Chardin ou la saveur du savoir
Pierre Sterckx
- Lettre Volee
- Palimpsestes
- 15 Septembre 2015
- 9782873174477
La Raie est d'une violence spectaculaire et Chardin s'en est écarté très vite, lui préférant l'intensité de la couleur et celle du trait, rythmées en la vigueur fractale de la touche. Non plus cruauté d'une scène mais forces des sensations. Au-delà du supplice de La Raie, il s'est emparé de l'énergie première, celle qui disloque et agence les morceaux du sensible. Il évita de la sorte le piège dans lequel s'engouffrera tout le versant expressionniste de l'art moderne, soumission de l'expérimentation du medium aux effets attendus des formes ou des images torturées. Sa peinture est voisine de celle de Cézanne et de Bonnard car elle mit l'oeil du spectateur au travail, avec un siècle d'avance sur l'Impressionnisme. Elle concerna l'Encyclopédie de son ami Diderot par les rapports qu'elle instaura entre les jeux des enfants et la science des adultes. Brillat-Savarin (gastronomie) et Lavoisier (chimie) sont tout proches de lui. Chardin vécut ou pressentit les divers vacillements de son temps (banqueroute de Law, théâtre de Marivaux, révolution de 1789) mais il en aborda les troublantes incertitudes avec la ferveur de ceux qui croient au progrès.
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Qu'est-ce qui relie des cochons tatoués et la machine à excréter Cloaca, une bonbonne de butane décorée en Delft et une photo de montagne où s'inscrit un message privé, un vitrail et une excavatrice? La base de l'invariant de Wim Delvoye est à coup sûr son devenir-animal, un concept que Gilles Deleuze et Félix Guattari ont élaboré dans Mille plateaux.
La zone d'indiscernabilité du devenir-cochon (est-ce humain, est-ce animal?) introduit d'emblée à une double lecture des oeuvres de Delvoye selon la désignation de la profondeur (la chair du cochon) et la surface de la signification (le tatouage du cochon). II s'agit essentiellement. chez Delvoye, d'un travail de code à code, et cette double lecture peut aider à comprendre son amour des arts décoratifs, lesquels sont à la fois des écritures et des images.