Littérature
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Sarah Bernhardt, pourtant invalide, n'a pas hésité à donner
plusieurs représentations théâtrales devant des milliers de
soldats, regroupés pour voir l'une des grandes vedettes du
temps. Moment de détente dans la vie du poilu, mais aussi
propagande ou reflet de leur existence difficile, le théâtre
joue un rôle important dans la vie du Front pendant la
Grande Guerre. Or, il est encore l'un des territoires peu
connus de l'histoire culturelle de la Première Guerre
mondiale.
Le théâtre monte au Front explore les différents visages du répertoire
de ce moment crucial: des pièces censurées à celles
écrites par les poilus eux-mêmes, du théâtre patriotique au
pacifiste, des auteurs de l'arrière aux représentations des casernes
et des campements. Entre « bourrage de crâne » et
vision très réaliste donnée par les soldats, le théâtre propose
une image fouillée de la guerre, de ses représentations, et des
façons dont elle a été vécue.
Le livre se compose d'une série d'essais sur la vie théâtrale entre 1914 et 1918, depuis Paris jusqu'au Front, et y adjoint une anthologie d'extraits significatifs d'un répertoire largement inédit, voire méconnu.
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Aspect essentiel de son oeuvre, le théâtre a littéralement habité Jean-Richard Bloch. Sa première pièce fut montée par André Antoine à l'Odéon durant la saison 1910-1911. La suivante, Le Dernier Empereur, écrite après l'épreuve sanglante de la Première Guerre, a été jouée dans plusieurs théâtres parisiens avant de connaître le succès à Berlin chez Erwin Piscator. Mais c'est Naissance d'une cité, commandée par le Front populaire et jouée en 1937 au Vel d'Hiv, qui reste l'oeuvre la plus ambitieuse de Bloch auteur dramatique. Avec ce spectacle d'avant-garde Fernand Léger a signé le décor, Arthur Honegger et Darius Milhaud, la musique , Jean-Richard Bloch veut à la fois renouveler le répertoire contemporain, rénover la mise en scène et créer le premier « théâtre de masses » français.
Depuis 1910 et son essai sur Le Théâtre du peuple, Jean-Richard Bloch a souligné la nécessité d'écrire pour son époque, d'écrire « avec du présent ». En avance sur son temps, marqué à gauche, son théâtre fut parfois mal accueilli en France. Pourtant son essai, Destin du théâtre, qualifié par Jacques Copeau d'« admirable petit livre, le plus vivant, le plus informé, le plus intelligent que j'ai lu d'une main française sur notre art du théâtre », recueille l'estime unanime de la profession.
La réédition de ces deux textes, Le Théâtre du Peuple, critique d'une utopie et Destin du théâtre, indisponibles depuis plus d'un demi-siècle, redonne à l'écriture de Jean-Richard Bloch ce goût du présent qu'il défendait et illustrait à travers son théâtre et son engagement.
L'essai d'Antoinette Blum, en introduction, retrace l'itinéraire d'un intellectuel pour lequel le «théâtre associe dans un mariage inséparable le poète et le public, l'homme et l'époque».
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Si tout le monde connaît le Romain Rolland romancier, auteur de Jean-Christophe et de L'Âme enchantée, le théoricien du théâtre est aujourd'hui injustement méconnu en dépit de sa vision novatrice, voire révolutionnaire, de la scène.
Dans son essai Le Théâtre du Peuple, Romain Rolland étudie les expériences passées (de la Révolution française au théâtre de Bussang de Maurice Pottecher, premier théâtre du peuple) et fait une série de propositions pour fonder un véritable théâtre populaire " machine de guerre coutre une société caduque et vieillie [...]. Il s'agit de fonder un art nouveau pour un monde nouveau. " La force révolutionnaire de ce projet fait reculer le gouvernement qui s'était pourtant engagé à soutenir cette initiative.
Dans la préface à cette édition de Chantal Meyer-Plantureux, on peut suivre, grâce aux extraits d'un petit carnet inédit intitulé Le Théâtre du Peuple à Paris 1899-1900, le combat politique de Romain Rolland pour imposer son idée. Le ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts procédera lui-même à l'enterrement de ce projet généreux et ambitieux. Le rôle précurseur de Romain Rolland fut oublié mais ses idées ont néanmoins irrigué et fécondé toutes les réalisations de théâtre populaire du XXe siècle.
Le Théâtre du Peuple, cet essai fondateur, frappe par la justesse et la modernité des analyses de Romain Rolland.
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La critique dramatique révèle l'état de la société.
Lorsque Emile Zola et Octave Mirbeau entrent en guerre contre Francisque Sarcey, c'est à la bourgeoisie réactionnaire de la IIIe République qu'ils livrent bataille. Romain Rolland, dans le titre " Point de critique ", résume bien l'attitude des auteurs vis-à-vis de la critique d'humeur. Marcel Pagnol s'indigne. Dans L'Impromptu de l'Alma, Eugène Ionesco ridiculise les critiques de la revue Théâtre populaire, notamment Roland Barthes et Bernard Dort.
Les metteurs en scène ne sont pas les derniers à manier l'ironie féroce. Et lorsque Jacques Lassalle dénonce les médiocrités de la profession, n'adresse-t-il pas des griefs analogues à ceux que Jacques Copeau lançait à Léon Blum ? N'y aurait-il alors que de mauvais critiques ? Parole à la défense ! Les textes de Bernard Dort, Georges Banu et un entretien inédit avec Bertrand Poirot-Delpech permettent de dessiner avec finesse et lucidité les contours d'une critique exigeante.
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