République des Lettres
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Van Gogh, le suicidé de la société
Antonin Artaud
- République des Lettres
- 2 Novembre 2023
- 9782824901831
C'est à l'occasion d'une exposition Van Gogh au Musée de l'Orangerie en janvier 1947, peu avant sa mort, qu'Antonin Artaud écrit ce texte. Il n'y a pas loin, il le sait et il veut qu'on en soit persuadé, de Vincent Van Gogh à Artaud le Mômo. Le ton est âpre, l'ironie mordante, le style jaculatoire. Ainsi, écrit-il, «on peut parler de la bonne santé mentale de Van Gogh qui, dans toute sa vie, ne s'est fait cuire qu'une main et n'a pas fait plus, pour le reste, que se trancher une fois l'oreille gauche, dans un monde où on mange chaque jour du vagin cuit à la sauce verte ou du sexe de nouveau-né flagellé et mis en rage, tel que cueilli à sa sortie du sexe maternel». Pour l'auteur du "Théâtre de la Cruauté", Van Gogh «ne s'est pas suicidé dans un coup de folie, dans la transe de n'y pas parvenir, mais au contraire il venait d'y parvenir et de découvrir ce qu'il était et qui il était, lorsque la conscience générale de la société, pour le punir de s'être arraché à elle, le suicida. Et cela se passa avec Van Gogh comme cela se passe toujours d'habitude, à l'occasion d'une partouse, d'une messe, d'une absoute, ou de tel autre rite de consécration, de possession, de succubation ou d'incubation.»
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En janvier 1898, Émile Zola, alors en pleine gloire littéraire, décide de s'engager totalement pour la défense d'Alfred Dreyfus, militaire juif injustement condamné pour trahison. Il publie dans "L'Aurore" une lettre ouverte adressée au président de la République Félix Faure. C'est son fameux pamphlet "J'Accuse...!", puissant texte de combat dans laquelle il dénonce le complot de l'état-major militaire. Il est inculpé et condamné à un an d'emprisonnement. Il quitte la France pour l'Angleterre, d'où il ne revient qu'un an plus tard, abreuvé d'injures, calomnié, radié de l'ordre de la Légion d'honneur. Il meurt en 1902, sans avoir vu triompher la vérité et le capitaine Dreyfus finalement innocenté. Mais l'écrivain a su avec son "J'Accuse...!" accomplir un acte dont la valeur morale et sociale a été déterminante, et devenir un modèle pour tous les intellectuels épris de justice et de vérité. Le texte est suivi d'une biographie d'Émile Zola et d'un entretien avec Madeleine Rebérioux sur l'Affaire Dreyfus.
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Le "Théâtre et son double" est un volume d'essais, conférences, manifestes, notes et extraits de lettres consacrés au théâtre. Dans sa langue poétique inspirée et percutante, Antonin Artaud poursuit ici sa quête métaphysique et répond à plusieurs questionnements théoriques. Selon lui, il faut rendre au spectacle contemporain sa dignité de manifestation religieuse, c'est-à-dire que le théâtre n'a de sens que s'il est raccordé au drame originel de la condition humaine. Il réagit contre les excès de psychologie et de morale, appelant l'avènement d'un drame qui rompe enfin avec «la dictature de la parole» et privilégie les aspects «physiques» des sentiments que doivent éprouver les spectateurs. Remontant aux sources pures du théâtre, à la tragédie antique, aux mystères du Moyen Âge comme aux formes dramatiques de l'art oriental, il préconise «une utilisation magique de la mise en scène» et un «langage de signes» qui puisse ressusciter dans le public l'expérience de la terreur. "Le Théâtre et son double" rassemble notamment: "Le Théâtre et la peste", "La Mise en scène et la métaphysique", "Le Théâtre alchimique", "Théâtre oriental et Théâtre occidental", "Un Athlétisme affectif", "Sur le Théâtre balinais", "En finir avec les chefs-d'oeuvre", les "Lettres sur le langage", les deux célèbres manifestes sur "Le Théâtre et la Cruauté" ainsi que "Le Théâtre de Séraphin". Il a eu, et a encore de nos jours, une très forte influence sur la création théâtrale.
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Le flâneur des deux rives
Guillaume Apollinaire
- République des Lettres
- 17 Décembre 2016
- 9782824903453
Publié à titre posthume en 1918, "Le Flâneur des deux rives" est un recueil des meilleures chroniques de Guillaume Apollinaire parues en revues ou restées inédites à sa mort. Aussi mélancoliques que poétiques, elles relatent ses promenades, réelles ou imaginaires, dans un Paris insolite et familier du tournant du XXe siècle: "La librairie de M. Lehec", "Les noëls de la rue de Buci", "Les quais et les bibliothèques", "Le Bouillon Michel Pons", "La cave de M. Vollard", etc. «Les hommes ne se séparent de rien sans regret, et même les lieux, les choses et les gens qui les rendirent le plus malheureux, ils ne les abandonnent point sans douleur.» ("Souvenir d'Auteuil").
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Chant de l'amour et de la mort du cornette Christophe Rilke
Rainer Maria Rilke
- République des Lettres
- 28 Novembre 2013
- 9782824901480
À la fois poème lyrique en prose, récit épique et méditation sur l'expérience de la vie et de la mort, le "Chant de l'amour et de la mort" s'inspire du tragique souvenir de l'un des ancêtres du poète, le cornette (porte-étendard) Christophe Rilke qui, après avoir découvert l'amour dans les bras d'une jeune femme, est tué lors d'une chevauchée héroïque pendant une bataille entre les armées de l'Empire austro-hongrois et de l'Empire ottoman. Pour l'auteur même des "Lettres à jeune poète", cette oeuvre de jeunesse écrite en une seule nuit a «le rythme du sang qui le traverse, qui le porte, qui l'entraîne d'un bout à l'autre, sans qu'il y ait un moment d'hésitation ou d'incertitude.»
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Texte intégral révisé suivi d'une biographie de Guillaume Apollinaire et de neuf reproductions hors-texte. Sous-titré "Méditations esthétiques", cet essai publié en 1913, tout empreint du lyrisme propre au poète, se compose deux parties: la première, "Sur la peinture", constitue une introduction d'ordre général à la seconde, "Peintres nouveaux", dans laquelle l'auteur d'"Alcools" analyse les oeuvres de neuf peintres représentatifs du cubisme alors naissant: Pablo Picasso, Georges Braque, Jean Metzinger, Albert Gleizes, Juan Gris, Marie Laurencin, Fernand Léger, Francis Picabia, Marcel Duchamp, et un sculpteur: Duchamp-Villon. C'est la première tentative pour définir les caractères propres au jeune mouvement cubiste: son esprit, son ambition, sa nécessité historique. Pour Apollinaire, le cubisme n'impose pas de sujet, il n'imite pas la nature, il ne cherche pas à plaire. Réfutant l'accusation de nourrir des préoccupations géométriques, il en appelle à la sensibilité des Grecs devant la beauté d'un simple trait sans signification usuelle, et estime que les figures géométriques sont aux arts plastiques ce que la grammaire est à l'art d'écrire, les peintres du XXe siècle étant naturellement amenés à se préoccuper des mesures de l'étendue et de rejoindre ainsi les perspectives ouvertes par la géométrie non-euclidienne. Pour lui, les grands artistes ont pour fonction sociale de renouveler sans cesse l'apparence que revêt la nature aux yeux des hommes et de déterminer ainsi la figure de leur époque, celle-ci étant en l'occurence plus cérébrale que sensuelle. Récusant aussi l'accusation de "mystification" lancée contre les nouveaux peintres, il trace un historique du cubisme, de ses origines jusqu'aux expositions de 1912, faisant preuve pour l'époque d'une surprenante pénétration dans l'analyse des oeuvres et exaltant notamment celle de Pablo Picasso, qu'il évoque à la fois comme homme et comme peintre. "Les Peintres cubistes" d'Apollinaire contribua grandement à l'essor du mouvement cubiste dans l'histoire de l'art moderne.
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Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes italiens
Giorgio Vasari
- République des Lettres
- 23 Mai 2020
- 9782824905457
Publié d'abord en 1550, puis réédité en 1568 dans une version étendue aux artistes de son époque, les "Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes italiens" de Giorgio Vasari sont considérés comme le texte fondateur de l'Histoire de l'art. L'auteur utilise sa profonde culture artistique et le riche matériel rassemblé aux cours de ses rencontres, voyages et travaux pour livrer une importante documentation sur quelque 200 artistes du XIIIe au XVIe siècle: biographies fouillées, catalogue des oeuvres, choix stylistiques, anecdotes et légendes, agrémentés souvent d'un commentaire personnel. Il présente et classe chaque artiste dans une perspective historique mais aussi mythographique et poétique. Il est le premier à utiliser le terme de «Renaissance» pour qualifier son époque. Renaissance qui se réalise selon lui à travers trois périodes correspondant aux trois parties du livre. La première comprend les maîtres du XIIIe et XIVe siècle, la deuxième les artistes du XVe siècle, enfin la troisième époque, l'âge d'or. Grâce à un langage brillant, clair et mesuré, Vasari décrit avec bonheur peintures, sculptures, gravures et architectures. Devenu rapidement célèbre dans toute l'Europe, le livre a exercé une large influence sur la critique d'art au cours des siècles. Cette édition rassemble un choix raisonné des vingt-quatre meilleures «Vies» de Vasari: Cimabue, Giotto, Uccello, Ghiberti, Masaccio, Brunelleschi, Donatello, Fra Angelico, Ghirlandaio, Botticelli, Mantegna, Le Pérugin, Léonard de Vinci, Le Corrège, Bramante, Fra Bartolommeo, Raphaël d'Urbin, del Sarto, Le Rosso, Marc Antonio, Jules Romain, Le Sodoma, Michel-Ange et Le Titien. Une biographie de Giorgio Vasari complète le volume.
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Dans ce classique d'histoire médiévale, l'auteur de la "Vie des Formes" montre d'abord le sens de l'an mil. Un premier chapitre traite des terreurs de l'époque, en particulier de celles sur la fin du monde, et de leur effet sur la renaissance architecturale qui s'esquisse alors. Un autre décrit la formation de l'Occident, en insistant sur le rôle des villes, de l'Église et du roi Robert le Pieux. Un troisième est consacré à Gerbert d'Aurillac, le savant devenu le pape de l'an mil sous le nom de Sylvestre II. Henri Focillon rappelle à ce propos l'état avancé des sciences et de la culture dans la société de l'époque, au moins dans les classes dirigeantes. Le dernier chapitre brosse un tableau de l'influent Saint-Empire germanique et de la personnalité d'Otton III.
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Texte intégral révisé. Biographie, filmographie et théâtrographie de Gérard Philipe (1922-1959), accompagné de 20 photographies de scènes de cinéma et de théâtre. Il est mort à trente-sept ans, au sommet de cette courbe que dessine la vie. On évoque Mozart, Van Gogh, Rimbaud, Modigliani, Apollinaire. Mais si le travail, la misère, l'alcool ou la guerre ont usé prématurément ces génies, Gérard Philipe a disparu en pleine force, en pleine gloire. Il était de ces hommes dont le destin n'est pas d'épouser le rythme qui conduit de l'éblouissement de la jeunesse aux amertumes du déclin. Il était la jeunesse. Est-ce pour cela qu'il devait s'effacer brusquement, comme s'il voulait laisser de lui une image idélébile, et non celles que la vie superpose en nos successives apparences ? On pense au mot que Jean Renoir fait dire, dans Le Fleuve, à l'un de ses personnages à propos de la mort de Bogey: Il s'est échappé...
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Avant d'être le grand critique d'art médiéviste que l'on connaît, Henri Focillon fut aussi un spécialiste des arts asiatiques. Au début de sa carrière, il publia deux essais magistraux où il synthétise sur un ton philosophique et poétique ses travaux de recherche: l'un est consacré au maître de l'estampe japonaise, Hokusaï, et l'autre à l'Art bouddhique. Dans cet ouvrage, l'auteur de La Vie des Formes, à l'époque professeur d'histoire de l'art à l'Université de Lyon et Conservateur des musées de la ville, se plaît notamment à rapprocher l'art du Gandhara de la sculpture médiévale occidentale. Les cinq chapitres qu'il consacre aux origines de l'art bouddhique retracent d'abord la vie légendaire de Bouddha avant de méditer sur la philosophie et l'esthétique du renoncement. Ils examinent ensuite plus en détail l'architecture des sanctuaires et des monastères des régions d'Asie où s'est répandu le Bouddhisme (Chine, Inde, Japon, Birmanie, Tibet,..), ainsi que la sculpture des diverses écoles bouddhistes, comparée à celles de l'Hellenisme, à travers leur panthéon de divinités. Cet essai sur les arts asiatiques et le Bouddhisme intéressera aussi bien les amateurs d'esthétique et d'histoire de l'art que les voyageurs en partance pour l'Asie.
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Paul Cézanne et Émile Zola à Aix-en-Provence, à l'époque où la ville ne comptait encore que 25.000 habitants. Où l'on parle peinture - Degas, Monet, Renoir - et littérature - "Les Rougon-Macquart" - mais aussi du Collège Bourbon, de l'Affaire Dreyfus, du Canal de Provence, du Jas de Bouffan, du Musée Granet, de la Montagne Sainte-Victoire et des baignades dans la rivière L'Arc. Où l'on voit aussi comment, entre les murs tortueux et encaissés des ruelles d'une des villes phares de la culture hexagonale et estivale, Aix-en-Provence, joyau de la "terre des festivals", le génie des deux hommes fut alors accueilli et abondamment méprisé.
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Portraits croisés
Federico Fellini, Pier Paolo Pasolini
- République des Lettres
- 7 Novembre 2012
- 9782824900704
Entretien Cinéma. Entre intransigeance néo-réaliste et trouble baroque, entre idéologie et imaginaire, à l'heure précise où tout bascule, c'est-à-dire où une époque change de poétique... nous sommes en 1965. Un couple exceptionnel part en voiture à la recherche de "la Bombe", la mythique pétroleuse romaine. Ce sont Pier Paolo Pasolini et Federico Fellini. Ils ne la trouvent pas; mais après cet étrange voyage, Pasolini écrit un extraordinaire portrait du réalisateur de Rimini. Ensuite, Fellini, par-delà la mort et les malentendus professionnels et idéologiques, répond à son ami disparu.
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Texte intégral révisé. Biographie et filmographie de James Dean (1931-1955), principal acteur de La Fureur de vivre de Nicholas Ray, de A l'Est d'Eden d'Elia Kazan, et de Géant de George Stevens. James Dean est devenu le nom le plus mythique du cinéma mondial. Le culte considérable dont il fut l'objet reste sans précédent dans l'histoire du 7e Art. Héros d'un temps qui refléta toutes les aspirations de la jeunesse, il révéla un nouveau public avant de devenir culte. Mais, plus que ces considérations extra-artistiques, James Dean reste avant tout le créateur unique d'un frémissant art poétique, somme de toutes les interférences du monde adolescent. Il ne fut pas une idole de son vivant, ce qui le mit à l'abri du maniérisme, du salut de ralliement pour teen-agers. Ses attitudes font partie intégrante de son registre de comédien et l'on peut y déceler directement les disciplines sportives auxquelles il s'était soumis: yoga, danse, tauromachie, qui sont à l'origine de cette expressivité corporelle.
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«La production littéraire d'Eugène Delacroix se compose de trois éléments: ses articles parus de son vivant dans divers périodiques, ses notes éparses sur des albums, carnets et feuilles volantes, et sa correspondance. Tous ces écrits ont été publiés. Mais, tandis que les notes, rassemblées sous le titre de "Journal d'Eugène Delacroix", et les lettres, étaient livrées au grand public, les articles originaux ne bénéficiaient pas de ce privilège et restaient enfouis et oubliés dans un volume publié deux ans après la mort du maître par Piron, l'un de ses intimes. C'est ce dernier livre que nous exhumons aujourd'hui en y apportant quelques additions. Le livre comprend deux parties: 1° Les "Doctrines", écrits théoriques publiés par Delacroix et formant un corps de doctrines où la pensée du maître se révèle sous une forme moins pénétrante et familière, mais peut-être plus cohérente, que dans son "Journal". 2° Les "Impressions et méditations", composée des notes, réflexions et projets de toute sorte jetés au hasard par Delacroix sur ses carnets, complément indispensable à la première partie si l'on veut entrer plus profondément dans sa pensée.» - Élie Faure (Extrait de la préface).
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Vie des formes ; Eloge de la main
Henri Focillon
- République des Lettres
- 7 Janvier 2024
- 9782824907642
Dans cet essai majeur d'histoire de l'art, Henri Focillon développe dans une grande clarté une interprétation personnelle et non schématique de la «pure visibilité», synthétisant l'héritage de l'école historique et les découvertes bergsoniennes sur l'évolution et l'élan vital appliquées à l'esthétique. En cinq chapitres: «Le monde des formes», «Les formes dans l'espace», «Les formes dans la matière», «Les formes dans l'esprit» et «Les formes dans le temps», il rejette l'opposition scolaire entre «fond» et «forme» et met en évidence que la forme s'identifie à la pensée même de l'artiste. L'étude des formes est selon lui indissociable de l'étude des styles. Qu'elle soit de Piranèse, Hokusai ou Rodin, il part toujours de la réalité de l'oeuvre d'art et privilégie l'expérience esthétique de chaque oeuvre dans sa forme singulière, avec ses données matérielles, spatiales, temporelles, visuelles et mentales autonomes, plutôt que sa signification. Cette édition est complétée d'un "Éloge de la main" où il montre que le geste créateur de la main de l'homme, en exerçant une action sur la vie intérieure, transfigure la forme tout en métamorphosant la matière.