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Oxalide
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Extrait
Bureau du commandant de police Fourrier. Vendredi 30 septembre, 9h15.
— Hé, Al ! Tu veux un café tant que je suis debout ?
— Comment tu m’as appelé, là, Jean-Jacques ?
— Ben quoi, t’aimes pas ? Al, ça fait américain, Al Capone, tout ça, ça en jette, non ?
— Sans vouloir t’offenser, mon JJ, on n’a pas grand chose à voir avec l’inspecteur Harry ou l’Arme Fatale, tous les deux. On est juste deux pauvres losers dans un commissariat de banlieue pas franchement glamour.
— Justement, mon Alex, justement. Le glamour, il faut savoir le créer. Surtout là où il n’y en a pas. Si on se contente d’être Alex Fourrier et Jean-Jacques Aubert, officiers de police judiciaire, on va finir par se pendre comme à France Télécom.
Police Commander Fourrier’s office. Friday 30 September, 9:15 a.m. “Hey, Al! Want some coffee while I’m still up?”
“How did you just call me, Jean-Jacques?”
“What, don’t you like it? ‘Al’, that sounds American. Al Capone and all that, you know. It’s cool stuff, don’t you think?”
“Well, I wouldn’t want to hurt your feelings, my JJ, but we don’t have much in common with Dirty Harry or Lethal Weapon. We’re just two poor losers in a glamourless suburban police station.”
“Precisely, my Alex, precisely. You’ve got to create glamour. Especially where there is none. If we’re satisfied with being Alex Fourrier and Jean-Jacques Aubert, judicial police officers, we’ll end up hanging ourselves the way they do at France Télécom.” -
Extrait
Joseph, le commissaire divisionnaire, aimait bien Guy Dutour, le médecin légiste, homme discret et efficace que son métier avait amené à collectionner les macchabées, comme d’autres les papillons. La fréquentation des morts et des assassinés, la contemplation des crânes défoncés, l’étude des entrailles éparpillées, avaient poli les aspérités de son caractère et il portait sur le monde un regard amusé et désabusé. Éternelle cravate ficelle en cuir sur un col blanc, grosses chaussures, pantalon d’étoffe souple, il avait conservé dans l’allure quelque chose du jeune carabin qui se risque pour la première fois dans la salle de dissection. Le bon docteur n’était jamais à court d’un sourire ou d’une plaisanterie, souvent pour planquer une émotion prête à s’épanouir, comme une fleur de sel. D’ailleurs, il ne rata pas l’occasion :
— Le suicide ne fait aucun doute…
Joseph ne sourcilla pas et attendit la suite qui s’annonça très vite :
— Quand on mange des hamburgers et qu’on boit du coca, c’est qu’on n’aime pas la vie, ou qu’on en est dégoûté.
Il se pencha sur les cadavres carbonisés.
Superintendent Joseph was quite fond of Guy Dutour, the medical examiner, a quiet, efficient man whose job had led him to collect stiffs like other people collect butterflies. Close encounters with the merely dead and the murdered, the contemplation of fractured skulls, the study of scattered innards had smoothed the sharp edges of his personality, and he observed the world with an amused and disenchanted gaze.With his eternal narrow leather tie, white shirt, heavy-soled shoes and trousers of light-weight fabric, he still looked like a young med student sidling reluctantly into the dissection room for the first time. The good doctor always had a smile or a joke ready to hand, often as a means to hide an emotion lying just beneath the surface and ready to unfold, like a crystal forming. As expected, he didn't let the opportunity pass.
“It's a suicide. No doubt about it.”
Joseph didn't even blink an eye and waited for the punch line, which wasn't long in coming.
“When you eat hamburgers and drink Coke, itmeans that you don't want to go on living, that you're tired of life.”
He bent over the charred corpses.