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Le sentiment de l'exil est un des plus forts qu'on puisse éprouver. Il change le bonheur en mélancolie, les victoires en doutes et les chagrins en répétition. Il accompagne nos travaux, nos voyages, nos amours, nos relations et leur fait prendre une couleur fictive. Il transforme le présent en futur du passé. Le sentiment aigu d'être toujours dans la distance, de ne se sentir en phase avec aucune durée, est compatible avec un instinct de bonheur, une sorte d'animalité de l'esprit. En même temps, ce décalage est propice aux émotions nues. Tout naît de cette dépossession, source de plaisir et de perte à la fois. Elle renouvelle le sens du danger, les joies sèches de la route, les moments d'énergie, les longues périodes d'oubli de soi-même, et les transforme, contre toute attente, en souvenirs miraculeux. Peut-être que l'exil est une des voies d'accès à l'imaginaire poétique. Ou peut-être est-ce simplement un autre nom pour dire la poésie. La poésie invente, ou explore, un monde différent du nôtre : il lui ressemble, c'est la même planète, les mêmes arbres, les mêmes visages. Mais dans le monde jumeau, on éprouve qu'il est possible de vivre. C'est pourquoi l'amour y est si présent. L'exil et la fin de l'exil se trouvent donc en miroir, dans ce carnet qu'on emporte partout avec soi, ce regard en arrière qui recrée soudain l'unité des images perdues et des pensées promises au bûcher. Mers intérieures est un ouvrage aux contours multiples, une forme totalisante qui englobe vers et prose, poésie, narration et méditation, pour évoquer à la fois la peur de vivre et la joie de créer.
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Ce recueil tente de marquer une certaine inadéquation de l'être au monde. Inadaptés au lieu, inaptes à l'autre et séquestrés dans la parole qui est le bruissement de notre espèce.
C'est aller nus dans le noir.
Reste le poème.
Pas le vent de ce qu'on voulait dire, mais la nécessité des failles que les mots maintiennent béantes et du silence auquel ils exhortent.
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Ce nouveau livre de poésie de Corinne Hoex convoque la figure du vent, figure sans repos qui nous enfonce dans l'impression d'un vide inaliénable qui ne nous trompe pas au sujet de l'univers poétique que nous révèle ce titre, Uzès ou nulle part : tout ce qui demeure hors d'atteinte, tous ces paysages intérieurs, sont rejoints, touchés. Et ce serait une profonde erreur que de croire y découvrir quelque légèreté après y avoir identifié une telle obstination à tâter le fond de l'existence pour approcher au plus près ces lieux où aucune paix n'est jamais acquise. Au-delà de l'expérience singulière, cette parole poétique resserrée comme nulle autre, désigne un dénuement extrême, comme elle montre cette fragilité secrète épousant les limites de l'expression, et où se joue la présence de ce qui s'est absenté, où se découvre un quotidien épuré de ses strates inutiles afin d'atteindre le plus démuni qui est aussi chez elle le plus dense, là où l'autre se trouve désormais : nous nous offrirons / l'un à l'autre / de beaux moments / de manque, écrit-elle. Ce sont les coups et blessures qui s'y dissimulent, que l'on pouvait croire un instant égarés ; et qui reviennent avec une précision de la langue, de l'expression, celle d'une passion qui embrasse le vent. Quelque chose d'une urgence, d'une brûlure traverse ce livre exceptionnel.
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Ouvrage du récif est le premier livre de poésie d'Anne-Sophie Lancelin. Nourri d'une expérience exceptionnelle de l'expression corporelle à travers la danse et la musique, il fait faisant ainsi retour au plus vif de la vie, au plus sensible, à cette énigme qu'est le corps, en portant une attention de tous les instants, mais comme pour atteindre à l'impersonnel à partir du plus intime. C'est qu'un corps se cherche comme une âme. Dans un présent qui ravit au temps ses lois et ses emprises, le trajet de l'oeil, le songe, la marche, jour et nuit et, comme un rappel à soi, l'enfance, font barrière à ce qui dénature, ouvrent l'instant où se jouent les possibles et la matière d'où naissent les images. Les poèmes oscillent entre les éléments d'une narration et le vertige de la perte du lieu où se joue ce qui est dit. Le récif abrite, protège, s'étend, branches vives et mortes en forment le squelette. Il est un champ d'introversion, où les visions qui en émergent sont les voies d'accès à de véritables souvenirs : Ce qui vient de nous par surprise / vient sûrement d'ailleurs et ce qui sauve / s'est ouvert au danger sauf que // la promesse n'est pas redevable / le corps, un dernier recoin.
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Ce nouveau livre de poésie de Serge Meurant se décline en six suites formant un tout cohérent. Sous ce titre, Empreintes, nous pouvons aussi bien lire, dès l'ouverture, les moulages de la vie, déceler leurs lignes de forces, celles des résistances ouvertes sur cette confrontation manifeste aux angles morts du vivant, en évitant de s'enfermer dans quelque nostalgie.
Ces suites, tout en délicatesse, témoignent aussi bien de ce qui, du monde, affleure, comme de ce qui, de l'autre rencontré et tenu au plus près de soi, peu à peu s'écarte, tout en retenant cependant la trace, tel le froissement de l'invisible pareil à un drap qu'on déplie, pour reprendre les vers de l'un de ses poèmes.
Ainsi se rattache-t-il à la mémoire comme à la conscience de temps qu'elle rappelle à chaque instant. Les mots sont ajustés les uns aux autres avec une extrême précision, selon une langue magnifiquement maîtrisée, à la fois simple et complexe. L'auteur nous offre chaque fois un miroir à plusieurs faces où les figures évoquées relancent la subjectivité qui les porte.
Dès lors, cette poésie n'hésite pas à afficher un caractère personnel. Soutenue par une puissance d'évocation singulière, originale, elle condense des moments d'existence dans lesquels le lecteur peut parfaitement s'introduire afin de partager l'expérience saisie et ravivée par une langue poétique, dépouillée, elle attrape et retient jusqu'à bouleverser.
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Les rudérales sont des plantes qui poussent en toute liberté sur les terrains en friche, sur les bords des chemins ou dans la proximité de l'habitat humain. Et telle apparaît la parole poétique de Harry Szpilmann, singulière autant que remarquable par la lucidité dont elle fait preuve et la liberté d'expression qu'elle s'autorise. Le monde des Rudérales se construit en réponse à une attente toujours fragile et indécidable, à l'étonnement face à ce qui se montre, la rencontre du réel, sa morsure. C'est toute la présence de l'expérience sensible qui se trouve mobilisée, cependant que cette profusion du regard se double d'une réflexion sur le livre en train de se faire et les possibilités de l'écriture poétique, sa puissance et sa précarité. Pour autant, aussi attentive soit-elle aux ressorts de la parole et à leur soubassement de silence, la poésie d'Harry Szpilmann n'a rien d'un simple jeu formel. Elle se maintient coûte que coûte sur le fil d'une interrogation inquiète, pointant les désastres approchés par l'image, par l'imaginaire, afin de ramener à soi la matière improbable qui insuffle au poème sa chair et son tracé.
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L'Arbre en chemin s'inscrit dans le sillage de Parenthèses, paru voici deux ans. Dans cette suite alternant poèmes en vers et en prose, il semble que Philippe Jones condense en quelques pages aussi denses que limpides l'expérience de toute une vie en poésie. L'arbre occupe depuis toujours une place privilégiée dans l'imaginaire de l'auteur. Le revoici tel qu'en lui-même, campé dans sa matérialité d'arbre, mais simultanément envisagé dans toutes ses connotations symboliques, et enfin comme une métaphore de l'écriture poétique (« un arbre s'enracine / et se forge l'image »). À l'instar d'un arbre, le livre progresse en se ramifiant, évoquant tour à tour le rapport du poète au monde sensible, la femme, l'amour et le couple (ces deux êtres qui n'en font qu'un), les éléments essentiels d'un paysage intérieur - avant de se clore par le rappel discret d'un épisode tragique fondateur de la vie de l'auteur. La dédicace ouvrant le livre s'éclaire alors, et l'on comprend in fine que ce livre dessine aussi un autoportrait en creux.
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Comme son titre, "Ulysse Lumumba", l'indique peut-être, ce livre mêle l'histoire, proprement historique, d'un homme politique congolais nommé Patrice Émery Lumumba et la légende grecque (et donc occidentale) d'Ulysse, telle que nous l'a rapportée Homère. Il invente pour ce faire une forme hybride et inclassable, mariant la prose et la poésie, le récit, la fable et la méditation, le lyrisme et l'humour, le pastiche, le détournement référentiel et le brassage intertextuel où Dante et Rimbaud rencontrent Aimé Césaire.
Un tel foisonnement permet à Laurent Demoulin de multiplier les points de vue, de déconstruire en finesse et sans angélisme le regard occidental sur l'Afrique - non sans interroger au passage sa propre position d'auteur ; mais aussi de croiser et faire dialoguer les traditions culturelles africaine et européenne. En filigrane, une question : que faire, lorsqu'on est d'une génération ayant grandi au tournant des années 1960-1970 dans une Belgique encore prospère et tranquillement assise sur ses certitudes, avec le passé colonial du pays ; comment vivre aujourd'hui avec "ça" ?
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"Contre Jour" est un livre bref, d'une économie d'autant plus étonnante que son auteure parvient à condenser en quelques mots tout un univers de sensations qui sont dans un premier temps construites autour de couleurs et de formes et où les lieux minimalement évoqués sont présents à la manière d'une énigme. C'est alors sur un tout autre plan que se découvre la profondeur de cette écriture poétique d'une grande sobriété. Ce sont les effets d'étrangeté que porte cette écriture, c'est le sentiment de vertige qu'elle produit chez le lecteur qui retient immédiatement l'attention. Comme s'il s'agissait de lever un secret auquel nous ne pourrons pas accéder, mais qui se présente sous les aspects d'une obsession poursuivie avec obstination. Et c'est tout autant l'évocation du processus de la création picturale qui agit comme un palimpseste, à travers les rythmes de la voix. Et c'est une interrogation plus large sur le destin de l'être qui se découvre à travers les gestes et les rêves approchés, une manière d'aller à l'essentiel de la condition humaine sans aucun pathos, mais avec une densité et une justesse qui entame le réel, ce à quoi nous sommes toujours confrontés.
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"Malfeu" est la traduction française de "Wanvuur", paru en néerlandais en 2008.
Dans cette suite de poèmes en prose, Bart Vonck cherche à pénétrer les mondes multiples, souvent aléatoires, de la vie quotidienne afin de les rejoindre jusque dans l'infime détail. Chaque poème déplace notre regard pour mieux faire voir ce qui généralement se dérobe à notre attention, comme pour nous faire prendre conscience de l'étrangeté du monde qui nous entoure. C'est ainsi que "l'oeil étranger", comme il l'écrit - c'est-à-dire le regard constamment à l'affût qui se tient néanmoins à bonne distance pour ne pas se laisser submerger par les plates évidences -, nous révèle la plus grande clarté des choses et de la vie, puisque "ce qui reste étranger peut seul être appris". C'est ainsi qu'il s'invite comme il convie le lecteur à "s'éloigner au plus vite des chemins préférés des voyageurs". C'est ce "monde réel" qu'il tente de saisir au plus près, dans sa "densité des plus concrètes".
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Ce livre s'ancre dans la poésie en s'ouvrant sur la rencontre entre deux univers, l'univers musical et mental de Serge Gainsbourg, et l'univers secret de Bambou.
Il s'agit d'une fiction poétique autour de ce tandem Serge Gainsbourg-Bambou qui entend moins apporter une pierre de plus au mythe Gainsbourg qu'interroger de façon intimiste les zones de résonance entre deux êtres tendus vers l'extrême. Il n'est point question d'une traversée de l'oeuvre de Gainsbourg mais d'une traversée de son rapport au verbe, aux femmes, à la mort.
Le second volet de ce livre offre une suite poétique où l'auteure explore des contraintes de diverses natures - phonétique, syntaxique, stylistique... -, la règle de base importe moins que le bougé qu'elle produit dans l'ensemble du texte. C'est dès lors l'écart qu'elle catalyse à l'intérieur même du récit, les mouvements centrifuges et les effets déstabilisateurs qu'elle induit. Toucher aux conventions par l'inoculation d'une règle altère le poids d'évidence que nous conférons aux premières et dégage le geste constructiviste dont elles sont les retombées. C'est ainsi que l'adoption d'une contrainte déséquilibre le corpus de règles instituées, que l'adjonction d'une loi libère l'aléatoire. Le recours au lipogramme, à l'homophonie... vaut par la redistribution des paysages qu'il provoque. Les opérations de soustraction ou de prolifération de lettres, le transfert de procédés extra-littéraires dans le champ de l'écrit que ce recueil met en oeuvre ne ressortissent donc pas à l'esprit de formalisation, à son seul souci d'explorer les instruments dont il dispose. Il n'est, en effet, de jeu sur la structure qui ne soit un jeu sur l'événement. Il n'est d'intervention sur les codes de base qui ne soit ébranlement de l'agencement en son ensemble.
Il se dégage de cet ensemble une sensualité peut commune et qui ne s'enferme pas dans des formules : nous controns l'avancée des souffles de l'enfance / par une danse nuptiale / sexe contre sexe.
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Le titre de ce dernier livre du poète Harry Szpilmann peut avoir de quoi étonner le lecteur. Pourtant le terme Fulgor nous est familier sous bien d'autres désignations. S'il signifie éclat ou même splendeur, selon son étymologie latine, il ne laisse pas de doute sur ce que le mot figure lorsqu'il est associé à la signification d'éclat fulgurant, celui de l'éclair. Ce livre composé de textes poétiques courts atteint cette fulgurance de la parole attachée de près à la recherche de l'extrême concentration nécessaire à son expression. Il témoigne comme nul autre d'un travail qui s'opère sur l'usage le plus précis de la langue, lequel devient un véritable travail sur soi-même puisque c'est toute l'expérience de la vie qui s'y trouve approchée, interrogé en quelque sorte. Dans les tous premiers textes du livre, on peut lire ce fragment, dont on peut dire qu'il synthétise ce ton unique que le lecteur est appelé à ressaisir et à s'imprégner tout au long de cette suite poétique : Tout ce que jusqu'alors tu t'imagines avoir conquis : mirages et pâtures de néant. La foudre appelle, mais la flamme est devant. Ainsi l'ensemble de cette suite s'affirme avec force comme un tout, rivé à une économie maximale du déroulé de la parole en s'approchant de la prose sans ne jamais y céder, sans ne jamais s'y enfermer. De ce fait, cette parole à très haute densité poétique ne quitte plus le terrain de la pensée en un tissage entre prose et poésie qui s'impose à chaque moment de son expression. Alors que cette dernière se voit traversée de doutes permanents. Chaque séquence paraît toujours confrontée à l'indétermination de ses relevés, si ce n'est du fait que la vie n'offre pas de but donné d'avance, seulement des chemins à parcourir puisqu'elle est déjà à la poursuite de chemins qui ne peuvent se tracer qu'à chaque avancée. Cette voie poétique ne se décline pas au singulier mais bien à chacun de ses instants au pluriel : ... rien ne s'inscrit sur ta route que l'oppressante opacité de cette blessure sans fond. Plus qu'à simplement lire, ce livre, parce qu'il ralenti la lecture est un livre à méditer, car la langue atteint une profondeur exceptionnelle appelée à interroger le lecteur, tout lecteur : Toi que vivre écartèle et çà et là éblouit, de quelle blessure, de quelle brûlure ton souffle tire-t-il sa légitimité ?
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S'il fallait trouver une correspondance à l'écriture déjà bien maîtrisée de Harry Szpilmann, ce serait sans équivoque aucune au voisinage des Fernand Verhesen et Michel Lambiotte que se situerait ce poète. Il y a une proximité évidente entre ces poètes et cela jusque dans la manière même d'organiser un recueil : alternance de poèmes en prose et de vers libres. Des poèmes où une part d'insondable (et parfois même de l'hermétisme) est présente, des poèmes où est abordée la question théorique de la poésie, où un texte participe aussi d'une mise en espace, des poèmes qui résistent parfois à une première lecture, comme il en est aussi de la poésie d'un Paul Celan. Harry Szpilmann pratique la poésie comme l'entendait Fernand Verhesen dans ses merveilleuses Propositions : « un poème qui devient ce qu'il est à condition que la participation du lecteur soit effective ».
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Quel langage trouver pour dire ce qui tue? Quels mots poser sur le massacre ? Comment, déjà, parvenir à l'appréhender, la destruction du monde, dans toutes ses dimensions ? C'est-à-dire, peut-être, dans une valeur-monde, du côté de ce qui vit, de ce qui rampe, qui coule, qui bruisse, au fond : en se débarrassant d'une représentation humaine ? La tentative, ici, est celle d'une invention. Véronique Bergen signe dans Alphabets des loups un recueil qui fait parler - non pas « simplement » des loups - mais un devenir-loup, au sens deleuzien, au sens où la rencontre avec l'altérité est la condition du geste d'écriture. Il s'agit de quitter son territoire, d'avancer hors des sentiers battus, et de se reterritorialiser en s'inventant chat, oiseau, loup. » Maud Joiret
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Écrivain francophone originaire d'Anvers, Guy Vaes (1927-2012) a publié de la poésie, des romans et des essais. Il était aussi photographe et grand arpenteur des villes, d'Anvers à Londres. Son premier recueil de poèmes, Ce qui m'appartient, paraît en 1952. Son premier roman, Octobre long dimanche (1956), salué par Julio Cortazar, est devenu un classique du « réalisme fantastique » belge. En 1983, son deuxième roman, l'Envers, reçoit le prix Rossel. Il publiera deux autres romans au début des années 2000, les Apparences et les Stratèges. Essayiste perspicace dans Londres ou le Labyrinthe brisé (1963), la Flèche de Zénon (1966) et le Regard romanesque (1987), il fut aussi un critique de cinéma d'une grande pénétration.
Édition critique bilingue avec un essai et des notes de Bart Vonck.
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Gouttes ! lacets, pieds presque proliférants sous soleil de poche
Elke De rijcke
- Cormier
- 20 Mai 2005
- 9782930231525
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À la fois portrait et récit, ce livre est tout d'abord le journal poétique d'un séjour à Västerås, ville proche de Stockholm. L'auteur s'y est rendue en 2006 pour s'imprégner des paysages du "Sacrifice", le dernier film d'Andreï Tarkovski. Västerås est l'espace-temps non maîtrisable où s'esquisse, au fil des heures, la rencontre insaisissable avec la voix et le corps du cinéaste éparpillé à travers les champs, rivé aux lacs, résolu dans les nuages. À la façon d'un séismographe, l'écriture enregistre le champ magnétique de cette expérience qui transforme, dès l'arrivée sur place, les capacités de la perception sensorielle et du savoir. Or, "Västerås" est aussi le temps d'un bilan de la quarantaine, qui considère le fruit de vingt ans de vie d'adulte. Fruit aux goûts suspects d'une émancipation devenue impraticable par un temps de mauvaise conjoncture. L'auteur y évalue le tracé, l'état et la valeur des éléments qui ont déterminé sa vie : la poésie, l'amour, le travail, les amitiés, la féminité. "Västerås" est le livre-extraction d'un âge qui plonge dans la durée tout comme dans l'instantané d'une vie, à travers l'aventure du journal et de la phrase poétique.
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La poésie de Philippe Jones est habitée par un imaginaire qui ne cesse de porter la parole depuis l'expérience la plus immédiate vers les rives les plus incertaines de cet inconnu qui nous habite et qui nous environne. Dans "Couleurs d'un éveil", l'alternance entre textes en prose et suites en vers maintient l'équilibre entre la saisie sensible du réel, à juste distance, et l'aspect critique affirmant un rapport au monde devenu plus problématique que jamais.
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Dixième recueil de Serge Meurant publié au Cormier, "Célébration" porte bien son titre. La poésie de Serge Meurant est bel et bien célébration fidèle des proches, vivants ou disparus, et ce nouveau recueil, qui fait suite à "Vulnéraire" paru voici vingt ans, le rappelle d'un timbre murmuré, comme à voix basse. À l'émotion tenue à juste distance répond une prosodie dont la simplicité repose sur un travail attentif au rythme interne du vers, à la pesée exacte de chaque mot.
Depuis son premier recueil, "Le Sentiment étranger", en 1970, Meurant a toujours fait preuve d'une même démarche, marquée par une quête permanente du dépouillement et du dessaisissement, comme l'écrivait à son propos Pierre Chappuis dans la "Nouvelle Revue française". Chez lui règne une atmosphère particulière, comme si l'on baignait dans un clair-obscur, entre le proche et le lointain des choses, entre dit et non-dit. "Célébration" témoigne à nouveau de cette poésie du murmure, sinon de l'effacement, bien qu'elle soit évocation d'une expérience de la vie dans ses aspects les plus concrets. Conscient de la précarité de toute chose, et de la légèreté de l'être qu'il ne tient pas pour insoutenable parce qu'une sagesse très ancienne l'y a initié de longue date, l'auteur charge quelques mots d'être des fétus sur le cours du temps. Ses poèmes semblent fragiles, mais ils sont de l'ordre des roseaux qui ne se rompent pas. Meurant est de ces poètes qui engagent le lecteur à une écoute à ras des mots, mais qui propulsent vers d'insoupçonnables contrées.