Qu'il nous emmène à travers Bruxelles ou dans les plis de sa mémoire, sur les rivages bretons ou face aux belles gueules cassées, encore ailleurs, des fleurs, des herbes, des ici, Tom Nisse nous retient captifs de ses mots, de sa langue si particulière et universelle. Longtemps après que le livre soit fermé, les poèmes flottent en nous. Ils surgissent, reviennent crever l'abcès de nos journées comme ces lambeaux de rêve ou de cauchemar qui nous obsèdent.
Il y a une insistance, une évidence lancinante dans ces vers justes et faux ce qu'il faut, dans ce rythme à la fois ancien et neuf, qui nous font croire que Tom Nisse s'est toujours trouvé sur notre route. Mais non. Il débarque peu à peu et s'inscrit dans la lignée qu'il détourne. Tout de suite, nous savons qu'il nous accompagnera sur la durée et la distance.
Ces Reprises posent une nouvelle pierre sur le chemin d'un poète au long cours, d'un poète important. Essentiel. Ici, chaque texte ouvre et clôt un monde entier, chaque structure se soumet, adéquate, au propos. Ou peut-être est-ce l'inverse. Aucun artifice. Pas de fioritures.
Voici le poème de Tom Nisse, empreint du regard aiguisé, du regard lucide et chaleureux d'un écrivain à hauteur d'homme. Voici des mélopées du quotidien, modèle vingt-et-unième siècle, qui nous entraînent vers de nouvelles Ithaque à peine pressenties et pourtant déjà là. Ce diable les a trouvées puis nous les offre. Comment avaient-elles pu nous échapper ? À lire de toute urgence. (Serge Delaive)